Guérir un souvenir d’enfance douloureux et avancer sereinement
En voyant mon père, alors âgé, toujours envahi de tristesse pour son enfance, j’ai décidé d’être en Paix profonde et rassurée avec la mienne.
Avec la force de la Catherine d’aujourd’hui, je suis partie cet été vers un souvenir qui me bouleversait
« J’ai eu tort, je suis revenue. » — chante Barbara dans Mon enfance (et moi à tue-tête dans ma voiture).
Mais non, moi je n’ai pas eu tort.
Je reste émerveillée par ce que j’ai rapporté de ce voyage sur mes traces.
Dans cette histoire, je vous montre :
- comment j’ai traversé un petit traumatisme plus facilement avec la sophrologie et mon amitié intérieure
- et comment vous pouvez vous en inspirer pour avancer avec douceur, clarté et paix.
J’ai l’impression d’avoir effectué un voyage d’Alice au Pays des Merveilles.
Le temps était magnifique.
Les Hautes Vosges sont magnifiques.
Je sentais une vraie force en moi et une profonde joie mêlée d’excitation en arrivant sur les hauteurs de La Bresse, par la route de Rochesson.

J’avais repéré Belle Hutte sur la carte. Nom resté familier et désagréable en moi.
Belle Hutte : ni Belle, ni Hutte!
Dans mes souvenirs, ce sont des immeubles moches, pesants.
Ce fut le lieu de mon unique colonie de vacances en 1971, où à trois ou quatre ans, mes parents m’ont laissée trois semaines.
Ça a été l’horreur !
Si je refuse depuis catégoriquement les EHPAD pour moi un jour,
Si j’ai toujours détesté le Club Med et tous les clubs,
Si je ne suis jamais, Ô grand jamais, retournée en colo…
C’est lié à mon vécu à Belle Hutte.Belle Hutte – Belle Lutte pour ne pas faire la sieste. Mais on m’obligeait.
Dormir, vécu comme une perte de temps. Souvenir atroce dans ma mémoire, au point qu’il m’aura fallu des dizaines d’années pour apprécier une sieste !
Et aujourd’hui en 2025, avant d’entreprendre ce voyage vers mes Vosges et mon enfance, j’ai eu pleinement le temps de questionner mes croyances.
Mes souvenirs uniquement négatifs, je les ai remis en cause.
Vraiment, Petite Catherine ?
Sur trois semaines, tu n’as pas un seul bon souvenir ?
Je n’y crois pas.
Comme lorsque je parle aux enfants, le masque avait fondu.
Bon ok tu as raison me suis-je presque entendue répondre…
Et de bonnes sensations sont revenues.
J’ai traversé La Bresse (village des Vosges, pays du lard, pas la région de la volaille dans l’Ain !) avec la croyance que ça irait, que ces retrouvailles seraient agréables.
La Bresse fut longtemps l’un des villages les plus étendus de France. La traverser depuis ses hauteurs, c’était embrasser l’immensité encaissée, descendre, puis remonter vers Belle Hutte.
J’étais tranquille.
Bien dans ma voiture (pas de covoiturage ici. Mon silence et ma quête en dépendaient).
Quand le corps se souvient
Alors qu’elle ne fut pas ma surprise de sentir mon souffle se couper net, au sortir d’un virage de la forêt.
Belle Hutte, tout petit était là.


Un étau très solide broie mes côtes, impossible de respirer. Arrêt immédiat sur le bas-côté.
S’il y a bel et bien des moments où j’obéis au doigt et à l’œil, c’est quand mon corps dit “Stop ! ”
Pause.
Je m’observe.
Effroi.
Figée.
Je pourrais presque grelotter malgré les 35°C à l’extérieur.
Compassion, je ne sais plus où j’en suis.
Ah si, le bas-côté de la route et mon premier moment de surprise, à l’orée de la forêt. Je m’accorde tout le temps nécessaire pour récupérer.
Je ne suis pas obligée d’aller plus loin.
Totalement libre.
Je pourrais revenir une autre fois, une autre année. C’est possible.
Mais non, je suis comme poussée. Un indicible « Vas-y, tu ne risques rien. Avance».
Me libérer de mes fardeaux, être libre à nouveau avec de bons souvenirs : j’ai ça en moi.
J’ai repris la route.
J’étais bien au bon endroit : ça vibrait juste en moi. Je reconnais le petit chemin de terre et d’herbe qui nous servait de raccourci.
Le petit ruisseau m’attire. Je m’écoute. Je m’arrête.

Je n’avais pas de panique devant le ruisseau : cela me fait sourire. J’ai dû l’aimer ce petit cours d’eau. C’est léger en moi.
Et là, il se passe quelque chose que j’aime qualifier de rigolo, mais c’est une prise de conscience.
Apparaissent images et ressentis de mes joies de nature à Paris, de mes connexions à la nature. Partout, où que je sois, même dans les capitales dont je raffole.
Le millième de seconde suivant, je me dis que c’est la même connexion à ce qui me ressource encore aujourd’hui en admirant l’eau de la Seine ou un brin d’herbe entre deux pavés.
Là, j’extrapole bien sûr, je ne sais pas ce qui se passe dans ma biologie, mais je m’observe:
alors que je suis clairement en 2025 ET en 1971 à La Bresse, en même temps je découvre, fascinée, ce sentiment de sécurité né possiblement de ce premier moment de déchirure, de séparation.
Je reconnais en moi le processus quand j’apprends et, devant ce joli petit ruisseau vif, je plonge en moi !
Émerveillement : ne suis-je pas devant la source de ma capacité à me reconnecter à ma sécurité intérieure, à travers la Nature, partout où que je sois loin de chez moi ?
Sentiment fort d’appartenance au monde des végétaux, des animaux, à l’eau, à notre “mère Nature”, comme la nomment les “Natives” d’Amérique du Nord.
Je suis à la fois touchée et émerveillée de ma découverte ! Ça résonne juste en moi.
Ce n’est pas tout. Ma prise de conscience suivante est celle-ci :
Sans cette déchirure, je n’aurais peut-être pas développé cela. Je n’en sais rien, mais en tout cas, avec, c’est sans doute comme ça que je me suis pansée.
Et je l’observe 55 ans plus tard. C’est fascinant. J’adore.
Je me sens en sécurité là où 5 minutes plus tôt, je pensais que je serais encore en panique, vu ma réaction à la sortie de la forêt !
Toujours en voiture (je marche très mal en ce moment), j’ai quitté ce joli ruisseau en souriant, pour m’approcher de l’entrée de l’immeuble.
Et là, nouvelle douche froide.
Cette fois, c’est ma gorge qui est prise dans un étau qui serre, resserre. J’étouffe.
Je ne m’arrête pas : je roule au pas. Chère Envie de fuir que je reconnais.
Il faut bien vous imaginer cet endroit un peu étrange, où je ne vois personne.
Je pourrais être dans un vieil épisode de Chapeau Melon et Bottes de cuir avec Emma Peel.
Sauf que je suis seule.
Alors, la gorge nouée, je roule au pas. Je dépasse cet immeuble effrayant comme certains monstres dans les films de Miyazaki. Comme pour ne pas le réveiller, passer au ralenti.
Faire demi-tour. Puis, faire face.
Face à ce grand escalier où, soudain, je me revois, petite pitchounette assise.
Depuis ma voiture à l’arrêt, je revis ces moments comme un film où je me vois attendre mes parents. Trois semaines, c’était long pour moi.
Tous les mercredis, les parents pouvaient venir voir leurs enfants.
Les miens ne sont jamais venus.
Dans mon souvenir, tous les autres parents venaient.
L’adulte que je suis dans sa voiture se doute bien que ce n’est probablement pas vrai.
Envier ces enfants qui retrouvaient leurs parents, oui, ça me parle. Cela vibre juste en moi.
Mais qu’ils soient tous venus, non.
Je suis bien à ce moment-là. Je sens un espace de tendresse pour moi petite. Je me sens en sécurité.
Je ne nie pas ma peine qui est bien là. Bien réelle.
Je l’embrasse de mes bras doux et sûrs.
« Viens petite puce. Cette peine-là te relie à l’humain ». C’est important d’accueillir tout ça :
- La tristesse,
- L’impression d’abandon
- La résignation, savoir que d’autres ont ce que je n’ai pas.
Et deuxième énorme prise de conscience qui m’envahit : j’ai trouvé la source de ma peur totalement irraisonnée d’être en prison !
Cette prise de conscience a l’effet de l’eau fraîche sur mon visage quand je suis étourdie.
Pendant des années ma plus grande peur fut d’être enfermée. Certains malins m’ont même dit que j’avais peut-être provoqué ma paralysie avec cette peur. Cette hypothèse ne vibrait pas du tout. Mais c’est vrai que, lorsque je me suis retrouvée comme prisonnière dans mon corps qui ne bougeait plus, je me suis dit « ah tu vois, tu es prisonnière, ce dont tu as eu peur toute ta vie ! Mais tu es vivante ! »
C’était intense, cette peur de la prison en moi.
J’ai depuis mes 18 ans TOUJOURS sur moi ma CB et mon passeport pour pouvoir fuir à la seconde où j’en ai envie et là où je veux !
Pendant des années je me suis demandée d’où elle venait : d’un film ? d’une histoire ?
Or là devant cet immeuble, cet escalier, tout devient fluide en moi. Tout s’éclaire. Mon corps sait.
La source de ma peur d’être emprisonnée vient d’ici ! J’en fais le pari en tout cas.
Travelling arrière.
Sur ce chemin vers mon enfance, ma colonie de vacances à Belle Hutte a été repeinte et est devenue un immeuble d’appartements pour vacanciers.
Toujours dans ma voiture, ça s’apaise en moi.
Je ne vais pas non plus y passer la journée. Je souris à mes parts impatientes.
Je me suis retrouvée, consolée, c’est bon.
On peut aller au lac de “Blanche Neige”. “Blanche Mer” en vrai. Comment y aller ? C’est tout près je le sais. Une heure de marche me dit mon GPS. Et alors encore d’autres souvenirs remontent :
- les bonbons Coquillages* que j’adorais !
- les pique-niques avec la colo,
- moi en queue de cortège tranquille tenant la main d’un moniteur,
- le petit chemin de traverse aperçu plus tôt,
- l’odeur du goudron que j’aimais bien,
* Il faudra attendre la chanson de Renaud pour que je découvre qu’il s’agissait de Mistrals Gagnants (j’avais 3 ans !)
Et là en 2025, avant de quitter Belle Hutte, j’ai jeté le sac poubelle de ma voiture dans les bacs devant l’immeuble, qui ne m’effraye plus. Un geste symbolique de jeter ce qui n’a plus lieu d’être.Un jeune homme de l’âge de mes moniteurs de l’époque, passe en voiture et me sourit. Comme s’il venait de mes 3 ans.
J’ai souri en retour et suis repartie allégée, soulagée.
En paix.
Revenir au présent

Lac de Blanchemer – Lac de Blanche Neige
Direction, là où nous allions parfois avec ma colo : le lac de Blanche Neige !
Dans mon souvenir, il avait un côté magique, ce petit lac de l’ère glaciaire, qu’il n’a pas perdu. Petite, j’y guettais les personnages de dessins animés.
Là, à nouveau, je souris à moi-même : je suis sûre que je l’ai adoré aussi pendant ma colo, ce lac ! La preuve, j’y suis bien là en y retournant, alors que je suis toujours dans cette rencontre avec mon temps “Belle Hutte”.
Certes, mon père aussi aimait ce lac, et j’ai retrouvé le lieu de nos barrages en cailloux patiemment construits à deux.

Alors, tout en douceur, tout en beauté, tout en paix, le lac m’a reconnectée à aujourd’hui.
Avec les touristes autour de moi, les feuilles, les familles, les enfants :
j’étais bel et bien de retour à l’été 2025.
Riche du succès de ma mission de sauvetage de la petite Catherine qui se vivait abandonnée en colo, coincée en 71.
Je souris en repartant vers le Ménil, où de nouvelles aventures bien de 2025 m’attendent. Cher vivant, me voici !
Ce que je retiens
ressources pour vous
Ce qui m’a surprise :
- un corps en “état de choc” malgré un « petit » traumatisme ;
- l’efficacité de l’amitié de soi à soi ;
- des prises de conscience libératrices et non douloureuses possibles 55 ans après.
Avertissement. Je ne suis ni psychiatre, ni psychologue.
Je suis sophrologue.
J’appuie mon travail sur le corps, la respiration et des repères concrets pour retrouver souffle, fluidité et action. En cas de traumatisme avec un grand T (abus, violence…), consultez un médecin et/ou un psychologue spécialisé, dans un service hospitalier adapté.
1) Le corps d’abord — reconnaître & réguler
- Repérer les signaux : souffle coupé, gorge serrée, poitrine en étau, tremblements.
- S’arrêter et se mettre en sécurité : bas-côté, lieu calme, porte fermée.
- Respirer simplement : prolonger l’expiration, mains posées (poitrine/ventre), 5 – 10 cycles.
- Laisser passer la vague : on ne se force pas ; on peut revenir plus tard.
- Reprendre seulement quand c’est possible, pas à pas.
2) Amitié de soi à soi — douceur, clarté, cadre
- Zéro jugement : accueillir ce qui est là (peur, tristesse, jalousie, fatigue).
- Paroles d’appui, courtes et nettes : « Je suis là. Tu n’es plus seule. » ; « Tu n’y retourneras plus. » ; « On avance doucement. »
- Geste de soutien : main sur le cœur, se prendre dans les bras (un geste qui vous fait du bien).
- Cadre sécurisé : position assise si besoin, issue visible, droit de s’arrêter.
- Respect des limites : si c’est trop → pause. La pause fait partie du soin.
3) S’appuyer sur le réel — ce qui aide vraiment
- Choisir 3 appuis concrets qui apaisent (ex. marcher lentement, regarder l’eau qui coule, appeler quelqu’un, boire chaud/froid).
- Les utiliser sur place : s’arrêter, rouler au pas, s’asseoir, écouter le silence.
- Mini-rituel avant / pendant / après :
- Avant : fixer un point d’arrêt possible.
- Pendant : un seul objectif (respirer / observer / nommer).
- Après : un geste de clôture (jeter un sac, boire un verre d’eau, écrire trois lignes).
- Noter ce qui marche pour le réutiliser la prochaine fois.
Une dernière clef avant de nous quitter ?
- Comment pouvez-vous vous inspirer de mon histoire pour avancer avec douceur, clarté et paix?
- En vous demandant : “De quoi ai-je Besoin là maintenant* ?
- Et en vous écoutant.
Conclusion
Je ne suis pas allée exprès à Belle Hutte. Il se trouve que j’allais tout près. C’est si joli nos Hautes Vosges.
C’est un mélange entre la Vie et moi qui a fait que j’ai suivi ma petite voix pour aller vivre cette expérience.
Peut-être aussi les enseignements de Gabor Mate, psychiatre canadien vieux spécialiste de la Compassion dans le soin, qui donne un cours passionnant H.E.A.L dédié aux traumatismes.
D’ailleurs anecdote intéressante, en anglais il y a une notion de globalité dans le mot Heal (wholeness pour être précise) qu’on pourrait traduire par Se reconstruire ou se soigner en se reconstruisant.
Et je trouve que c’est ce que cette histoire ici raconte.
J’ai une émotion et une gratitude intacte pour notre biologie et tout ce qu’elle peut pour nous.
Belle Lutte, lieu de peur et de rejet, est redevenue
Belle Hutte, lieu de guérison et de réconciliation.
Ref. – Kristin Neff ma professeur de Fierce Compassion (inclus dans le Mindful-Self Compassion) a écrit ce livre que je recommande :
“S’aimer – Comment se réconcilier avec soi-même” Ed. Belfond, coll.L’esprit d’ouverture.
– Gabor Mate dit souvent dans ses interviews et dans sa formation H.E.A.L. : « Le traumatisme, ce n’est pas ce qui vous arrive. C’est le bouleversement interne qui fait suite à ce qui vous arrive. » SI le sujet vous intéresse, vous pouvez regarder ce film : https://thewisdomoftrauma.com/fr/

